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Hier soir, je me suis dit : allons voir la palme d'or de Cannes.

Dans la ville berceau du cinéma, ç'aurait été dommage qu'ils ne la projettent pas.

Oncle-Boonmee-celui-qui-se-souvient-de-ses-vies-an-copie-1.jpgIl s'agit d'Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures.

En général, je ne lis les critiques qu'après avoir vu un film, et bien m'en a pris. En gros y'a deux camps : "c'est un chef d'oeuvre" et "c'est un monument d'ennui".

J'aurais du mal à décider de la facture chefdoeuvresque de quoi que ce soit, mais en tout cas, je ne me suis pas ennuyée. Il faut dire qu'au cinéma j'aime lorsque le banal tutoie le fantastique et surtout lorsque ce dernier ne fait pas peur. Je déteste avoir peur, et ce film m'a rassurée. Ce qui m'a plu dès le premier abord c'est le fond sonore, qui m'a rappelée la Guyane et sa chaleur humide, une atmosphère de bruissement animal et végétal qui ne peut qu'amener à penser que nous ne sommes pas seuls. C'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai situé les deux premiers tomes d'Elnakin dans un environnement équatorial, seul endroit à mon sens où l'on est en mesure de croire aux esprits. J'ai aimé le peu de surprise devant l'apparition d'un fantôme au doux sourire, les doutes de Boonmee quant aux raisons de sa maladie, les regards et les sourires entre les personnages, leur bienveillance, leur souci de compréhension de langue (petit passage en français), leurs marches solidaires, longues et éreintantes, l'animisme naïf. J'ai adoré les yeux rouges dans l'obscurité, silhouettes qui vont hanter mon imaginaire longtemps, les ruptures dans la narration avec ces images fixes inquiétantes, voyage dans le futur et clin d'oeil réjouissant à Chris Marker (ou à Apocalypse now ?), et surtout ce conte étrange, au beau milieu du film, fable magique de princesse déchue et de poisson-chat amoureux (pas seulement de façon platonique et la surprise est à la hauteur de la beauté de la scène). oncle-boonme-apichatpong.jpg

Aucune critique n'en parle et c'est dommage : mais comment ne pas parler de la beauté du personnage de tante Jen ? C'est elle le pivot du film, elle le porte, plus que Boonmee, elle accompagne, elle écoute, elle observe, elle aide, elle rit. Personnage claudiquant et lumineux, elle ramène toujours les autres vers une vérité plus juste.

Je n'ai pas aimé, cependant, le masque à deux euros du fantôme-singe, qui prête plus à rire qu'à rêver et m'a un peu laissée sur le côté durant un moment, la caméra qui s'attarde sur des instants de grande banalité (à moins que je n'en aie pas perçu le sens, ou bien la nécessité narrative ?), et surtout mon voisin de cinoche qui ne cessait de pousser de longs soupirs profonds (bon sang un ciné n'est pas une prison, faut sortir quand on s'ennuie !).

En tout cas un moment hors du temps, un long rêve hypnotique et bienfaisant. Pour le prix d'une séance de ciné, c'est pas cher.

 

Tag(s) : #au long cours