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Rendez-vous avec un chat lorsqu'on a onze ans, rendez-vous avec l'amour plus tard, rendez-vous avec ce que l'on sera, rendez-vous avec ce que l'on a été, rendez-vous de spectateur face à ce que vivent les autres, rendez-vous avec ce que l'on ne saura jamais, ce que l'on ne vivra jamais car vécu par d'autres, avec ce que l'on a déjà vécu mais autrement.

 

Je pense souvent au narrateur du Grand Meaulnes ou bien à celui de Gatsby. Lol V Stein, aussi. Me suis ré-intéressée à ces histoires récemment, par fascination avec cette place-là, dedans et dehors.

 

Cette place à la fois dedans et dehors a une très forte ambigüité. Un rapport très étroit avec l'amour-amitié. Une mise à l'écart obligée. forcément obligée. Et qu'est-ce qui pousse le narrateur à raconter ? Cela ne peut être que l'amour. Un amour qui ne se vit que par les mots, qui ne peut fuir que par-là, sinon tout explose. Impossible de faire autrement, car la vie est ailleurs, dans ceux qu'il observe, et qu'il aime, et qu'il voit souffrir lui-même avec douleur. Le narrateur, sans aucun doute, aimerait que la personne observée vive ce qu'elle vit de fort avec lui, car elle le vivrait en outre mieux, plus sereinement. Ou bien il aimerait être à sa place. Mais la vie en a décidé autrement, et la vie l'a choisi pour un autre rôle. Elle l'a choisi pour ce rôle, le narrateur, car il est fait pour le retrait, pour l'amour en silence, pour une sorte d'amour religieux, qui ne peut inspirer la passion de l'être aimé, car trop total, trop peu faillible, sans jamais de porte qui claque. Les portes ouvertes, toujours, n'attirent pas. On n'aime que celles qui sont entrouvertes, mystérieuses, prêtes à se refermer violemment sur nos doigts.

Il est un être trop droit, et trop sensible. La vie le passionne, rien ne le fascine davantage, pourtant cette vie-même semble s'être retirée du narrateur. Il n'existe pas pour les amants autocentrés. Il leur restera à jamais incompris, en tout cas transparent. Au mieux, témoin. Au pire, confident. Il est le seul qui n'a aucune légitimité à souffrir puisqu'il n'est impliqué que de loin, et il ne peut rappeler la vie que par les mots (ces regards). Au final, qui aime avec le plus de passion ? Peut-être le narrateur, sans que personne n'en sache jamais rien. Seule la littérature le sait. Seule l'éternité, et non l'instant.

 

 

« Je vois tout. Je vois l'amour même. Les yeux de Lol sont poignardés par la lumière : autour, un cercle noir. Je vois à la fois la lumière et le noir qui la cerne. »

 


"Comme deux passagers dans un bateau à la dérive, ils sont, dans le grand vent d'hiver, deux amants enfermés avec le bonheur."

 

"Ce qui me plaît chez vous, ce sont mes souvenirs."

 

"Il m'adressa un sourire (...). Un de ces sourires rare, source d'éternel réconfort, comme on n'en rencontre que quatre ou cinq fois dans sa vie. Un sourire qui défiait -ou semblait défier - brièvement le monde entier, puis se focalisait sur vous comme s'il vous accordait un préjugé irrésistiblement favorable. Qui vous comprenait dans la mesure exacte où vous souhaitiez être compris. Qui croyait en vous comme vous auriez voulu croire en vous même."

 

 

"Dans le crépuscule enchanté de la grande ville, un sentiment de solitude me hantait parfois que je devinais aussi chez les autres - les pauvre employés de bureau (...) qui, entre chien et loup, gaspillaient les moments les plus poignants de la nuit et de la vie."

 

 

 

Tag(s) : #vaguelettes