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Gustav-Klimt-Portrait-of-Johanna-Staude-.jpg

(portrait de Johanna Straude, par Gustav Klimt)

 


La chaleur, au fond, se transmet sur les joues, les lèvres, en quelques creux du vêtement aux teintes à dominante froide.

Cou protégé douillettement, elle s'éloigne de la cheminée, derrière, flammes fascinantes, pour se diriger, résignée, regard clair, vers l'extérieur.

Elle retient un mot, qu'elle-même ignore, qui restera, lui, en-dedans, au chaud, un mot contre les métamorphoses inéluctables, un mot pour les rencontres, un mot pour la dissémination de soi, telles les cendres abandonnées, que l'on laisse derrière soi.

 

 

 

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Je me suis replongée dans La ligne 15. J'ai eu des réactions de jeunes lecteurs (disons lectrices) très encourageantes, voire enthousiasmantes. Ils (enfin elles) attendent la suite avec une telle impatience que je ne peux pas différer plus longtemps ce travail-là. J'ai pourtant demandé de reculer la date de sortie des deux derniers opus. Le diffuseur demandait déjà un titre ; ça m'est apparu impossible à cet état de (non-) avancement. Et puis j'aime avoir le temps, et le prendre. Je suis très lente lorsqu'il s'agit d'écrire des récits de vie. Et surtout, je déteste être pressée, cela me paralyse. Pour information : ce sera février pour les tomes 5 et 6, et mai pour les tomes 7 et 8.

 

D'autre part, je suis invitée, pendant Montreuil, à une soirée d'une grande maison d'édition jeunesse, puisqu'un de mes livres va paraître chez eux.  Je me sens flattée. Mais... y aller ? Ne pas y aller ? C'est un peu la crainte de l'errance parmi plein de gens que je ne connais pas. Il faut que je sonde copains et copines auteurs pour savoir s'ils y seront, sinon non, voilà (je ne vaux pas mieux que ma fille de 9 ans, parfois).

Aurais-je autant de mal avec Face-live qu'avec Face-book ? Dans un pareil cas, ce n'est guère différent.

 

Quant à la soirée de Talents Hauts, aussi pendant Montreuil, pour fêter la sortie de leur centième ouvrage, je m'y rendrai, cette fois sans aucun dilemme, d'abord parce qu'il s'agit du tome 3 de la Ligne 15, Plus belle tu meurs, ensuite parce que les éditrices et moi avons effectué un tel travail conjoint, depuis un an, sur cette série, qu'elles me paraissent désormais assez proches pour ressentir beaucoup de plaisir à les voir.

 

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Entendu sur France Culture des extraits de L'enfer du roman, en présence de l'auteur Richard Millet, écrivain (qu'il faut sans doute lire, car j'en ai découvert de très beaux extraits de roman) et aussi lecteur chez Gallimard. Le propos général de son essai (nous sommes entrés dans l’ère postlittéraire, caractérisée par l’hégémonie mortifère d’un genre) recueille assez mes suffrages pour m'amuser de ses excès. A l'antenne, il déplorait la féminisation de la littérature : il voulait dire par là, une certaine dérive intimiste (c'est fou comme l'amalgame est fréquent). Il le fait de façon suffisamment odieuse et provocatrice pour se faire détester, immanquablement. De ce fait, je ne le détestais pas. J'aime assez ce genre de personnage qui ose bousculer le discours ambiant et bien-pensant. Le problème, ce sont les raccourcis grossiers qu'on peut faire de ce disours. Je crois que l'erreur serait de monter au créneau. Je préfère approfondir. Et, sans dire qu'il s'agit d'une attitude purement féminine (combien d'hommes, aujourd'hui, adorent aussi "se" raconter, sans musicalité, de façon plate ? "Le sale petit secret" n'est pas une faiblesse réservée aux femmes), je suis assez d'accord avec lui. D'une façon générale, il faut déplorer le défaut d'exigence qui se généralise. Et je n'aime pas ce à quoi on aimerait cantonner les femmes : une certaine littérature dite féminine, purement intimiste, souvent victimaire, parfois glauque, même. Ce qu'il n'a pas su ajouter, ce cher Richard, en tant qu'homme peut-être, c'est que c'est aux femmes que ce jeu-là fait le plus de mal.

Il y a de toute façon dans une grande partie de la littérature, actuellement, quelque chose à dépasser, qui est de l'ordre de l'accès à sa propre dignité, l'acceptation de sa véritable valeur, et l'exigence qui s'ensuit alors (ou l'abandon, c'est selon). Un cap est à franchir en littérature, qu'ont franchi largement par exemple, entre autres, Siri Hustvedt ou Pierrette Fleutiaux, de grandes romancières, qui nous offrent à la fois structure et musique.

Aussi, le problème ne se situe pas dans le fait que 2/3 des manuscrits que reçoit Richard Millet en lecture soient écrits pas des femmes, mais dans ce qu'elles écrivent. Une plus grande exigence offerte aux lectrices visées (cible marketing intéressante) en réduirait le nombre considérablement. D'autre part, parmi le tiers restant, la proportion de bons manuscrits est-elle supérieure ? J'en doute fort, vu la production littéraire actuelle. Merci de ne pas se tromper d'inquiétude : mais Millet le sait-il déjà ? Et n'est-ce qu'une façon provocante de susciter le débat, en touchant les susceptibilités qu'il sait les plus sensibles - et pour cause vu le peu de place qui fut laissée aux femmes dans l'histoire de la littérature jusque-là- , pour bousculer les choses, enfin ? J'aimerais tant qu'on puisse le faire plus finement, sans écraser personne.

Tag(s) : #vaguelettes