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(Ernst Haas et Sandra Gottlieb)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Enchaîner Le lièvre de Patagonie de Claude Lanzmann après Purge de Sofi Oksanen est une drôle d'expérience (eh non je ne me suis finalement pas jetée sur un Faulkner). Lanzmann n'a pas écrit un roman (pourtant le résultat est incontestablement littéraire), et je vois que c'est ainsi qu'aurait dû procéder Oksanen. La facture roman établit une distance fictionnelle immensément dérangeante lorsque l'on parle de choses aussi graves et réelles, je veux dire si on choisit la description directe ou quasiment (pour info, au début Lanzmann décrit des exécutions, dans tout pays, de tout temps, et encore aujourd'hui). Je crois qu'on ne le peut pas, sous peine de détourner pour sa propre fin romanesque ce qui doit rester brut de réalité, par respect envers cette réalité. Il y a autre chose de plus problématique encore : décrire des sévices sexuels comme le fait Oksanen comporte une dimension très ambigüe, qu'on le veuille ou non, autant pour l'écrivain que pour le lecteur. La sexualité est un lieu que l'on ne peut explorer dans l'écrit sans éveiller des instincts primaires qu'il ne faut pas éveiller dans ce cas-là, surtout pas. C'est évidemment un problème immense, car comment parler sans détour des droits des femmes, très souvent bafoués dans ce domaine-là plus que dans tout autre ? Sofi Oksanen est tombée dans le piège : elle a décrit magistralement les comportements de peur et de honte et de stratégies de survie souvent peu louables, et pour cela le roman était la meilleure forme, mais elle a échoué à en décrire les causes, parce que c'était hélas indescriptible.

(En tout cas pour mes prochaines lectures je choisirai un peu plus léger parce que là, pfiou, c'est difficile, mais c'est une difficulté à ne pas contourner).

Tag(s) : #vaguelettes